mercredi 6 janvier 2010

Chapitre 5 - De decouvertes en decouvertes

J'ai été réveillée très tôt par un bruit tonitruant! j'ai accouru dans la grande salle de l'appartement, affolée. Sylvia était en train de se trémousser de manière extrêmement désordonnée sur un bruit tout à fait assourdissant.
Elle se tordait comme une folle dans tous les sens, on aurait dit qu'elle ne contrôlait plus ses bras. Très bizarre. Quand elle m'a vue, elle a tourné un bouton et le vacarme a été moins fort.

"Mais bordel Sylvia, mais qu'est ce tu fous? C'était quoi ça?" je lui dis, encore toute palpitante de la valve cardiaque.

"Bêh!! Je danse Erine!"

" Tu quoi???????????"

On croit rêver, si danser c'était ça, ça se saurait. Chez nous, la musique est douce, fluide, reposante. Et nous ne dansons que si c'est pour effectuer un rituel magique bien particulier.

" et ce bruit, c'était de la musique donc?"

"Ah ben wé, la meilleure même. Attention hein, j'écoute pas ça toute la journée, normalement, avec les consultations et tout, je mets l'ambiance avec des chants religieux, tout ça, mais quand c'est pour moi, ben ouais, c'est plutôt metal..."

"metal...?"

"ben wé. Metallica tout ça. ça fouette le sang non?"

" ah pas qu'un peu même, j'ai cru être en train de faire une crise cardiaque, c'est vraiment... fort."

"rappelle moi de t'emmener à disneyland toi, on se fera l'aerosmith, ça devrait te plaire" elle marmonne.

Pas le temps de répliquer, Sylvia tourne à nouveau le bouton pour emplir l'appartement de ce bruit incroyable. J'aurais pu baisser le son rien qu'en le souhaitant, mais j'ai préféré ne pas relever l'affront.
Je me suis sauvée dans le coin le plus reculé de l'appartement, et ai compulsé une encyclopédie, volume "B" histoire de ne pas avoir de temps mort dans mon apprentissage. Rien de très palpitant dans les "B" j'ai vite fait le tour. Puis j'ai attendu que Sylvia soit trop essoufflée pour continuer de gigoter frénétiquement.
J'ai entendu la douche couler et j'ai attendu encore.

Puis Sylvia est apparue. Belle, apprêtée, maquillée, une nouvelle robe longue asymétrique noire, bleue nuit et violette.

"Aloooors?? qu'est ce que tu veux faire de beau aujourd'hui??????"

"Je ne sais pas, il y a encore des choses que je dois voir tu crois?"

"... Tu penses peut-être avoir fait le tour du monde en 3 jours? Il en a fallu 80 à Philéas Fogg pour que l'histoire ressemble à quelque chose, alors t'as pas fini, qu'est-ce que tu crois? Bon tu veux voir de belles choses ou de mauvaises choses?"

"qu'est ce que c'est que ce choix tout pourri? Pourquoi pas me demander si je préfère avoir une jambe en mousse ou un bras de 9 mètres?" ( NDLA: Palmade, je t'aime ;) )

"ben je vais te montrer les choses qui sont différentes ici de chez toi, mais il y a des choses mieux ici, et des choses nettement moins bien ici que chez toi. Tu veux voir les avantages de ton nouveau monde, ou les inconvénients d'y être coincée?"

" euh, je sais pas, commence par les mauvaises nouvelles?"

"Okay, go!"

Manteaux à peine enfilés, elle m'a entraînée dans les rues froides, gelées, humides, sombres malgré l'heure. Après quelques virages dans les dédales de la vieille ville, nous sommes arrivées sur une place minuscule, entourée de nombreux porches, où s'agitaient une bande de vieux loqueteux aux multiples couches de vêtements rapiécés.

"Sylvia, qu'est ce qu'on fout là? On est obligée de passer par ici? Ces cons-là ne m'inspirent pas super confiance là, viens on fout le camp."

"Sois pas conne. Hey!! JP!!" elle s'écrie tout sourire en agitant la main vers un des vieux, dont le visage s'illumine soudain en la découvrant.

"putain Sylvia, ça fait un bail, t'étais passée où saloparde?" et il lui met une de ces claques sur l'épaule, j'ai cru qu'elle aller se ramasser les dents sur le pavé!

"Erine, je te présente JP. C'est un vieil ami à moi"

"Ah?" je fais, avec l'air le moins dégoutté que j'ai trouvé. ( il pue le mec, vous avez pas idée!)

Après avoir fait la tournée de bisous des vieux dégueu, Sylvia m'entraine un peu à part du groupe, pour me raconter l'histoire.

"Voilà, ça c'est une très mauvaise chose ici. Quand tu n'as plus d'argent, tu ne peux plus garder ton logement, et tu te retrouves à errer dehors. Ces gars là dorment dehors par tous les temps depuis plus de 20 ans. Ils restent ensemble toute l'année, pour se tenir chaud, pour ne pas devenir fous. L'argent fait beaucoup beaucoup de malheureux et ne fait en aucun cas le bonheur quand tu en as. Il n'y a pas d'argent chez toi, pas vrai?"

Je laisse mon regard se promener sur le groupe, je ne les vois déjà plus comme des grabataires sales et puants, mais comme des malheureux qui ont juste manqué de chance à un moment, j'ai mal au cœur, j'ai presque la nausée. Comment peut on les laisser comme ça? Il doit faire quelque chose comme moins quinze! Comment survivent-ils? Et pourtant, ils sont là, bien vivants, plein d'énergie. Ils ont même carrément l'air heureux, jusque parce que Sylvia leur rend visite.
Tout bien réfléchi, je dirais que c'est une mauvaise chose, mais qui en abrite une belle. Que les reclus, les rejetés de la société, arrivent à se rassembler entre eux, et à se créer un semblant de bonheur rien qu'en étant ensemble, à la chaleur humaine, faute d'avoir la chaleur d'une maison, c'est atroce, et en même temps, c'est super beau.

Chez nous, il ne fait jamais froid, nous construisons nous même nos maisons, sans devoir donner quoi que ce soit à qui que ce soit, une petite formulation magique et hop! Pourquoi n'est-ce pas aussi simple dans tous les mondes? La misère est vraiment une très, très mauvaise chose de votre monde.

Sylvia surgit à côté de moi.

" tu veux que je te montre tout de suite une belle chose, pour équilibrer?"

"carrément!"

Elle fait un petit tour sur elle-même, une sorte de révérence et:
"tadaaaaaaaaaaa!"

"quoi tada? où tada?"

" c'est moi la belle chose. Il y a 9 ans, je vivais avec eux ici, sans abri. Je dormais sur une marche, sur un vieux carton. Tous les soirs. Et puis JP m'a trouvée et protégée, ainsi que tout le groupe. J'ai passé plus d'un an ici. Je n'avais plus d'argent tu comprends, alors je n'ai pas pu garder mon logement, plus de travail, plus rien. Et il fallait qu'on passe le temps ici, alors j'ai commencé à lire les lignes de la main, tirer les cartes pour mes copains. Et JP m'a mise en avant dans la rue, il rameutait des clients... Et petit à petit, j'ai eu assez de fric pour sortir de là. J'en garde toujours un petit peu de coté pour eux, je leur en donne chaque fois que je viens. S'ils n'avaient pas été là, je serais surement morte. Ca pour moi, c'est une des très bonnes choses de notre monde. Derrière l'horreur et la misère, il y a des coeurs gros comme ça. Des gens qui aiment les autres malgré tout ce qu'on leur a fait subir. C'est une belle chose non?
Regarde-moi aujourd'hui, c'est moi qui recueille les pouilleuses dans ton genre" elle ajoute avec un clin d'œil. (le clin d'œil, ça doit être le contraire du soupir, j'ai bon?)

"exactement ce que j'étais en train de me dire..."

Mais quand même ce serait plus beau si d'un coup de "baguette magique" ils pouvaient se construire une maison, ces cons d'humains.

6 commentaires:

  1. J'adore, 5 chapitres d'un coup :) continu comme c'a c'est genial!

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  2. merci pour tes encouragements!!!

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  3. que du bonheur
    purée j'espère que tes bouchons vont te laisser souvent la paix afin d'aller encore plus loin
    c'est limite frustrant mais si bon d'attendre lol

    ps: dis moi, le dessin ... ce ne serait pas ton futur tatouage par hasard???

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  4. lol les filles! quelle tension dans vos commentaires mdr!!

    Pika, si si tu m'as démasquée ;)

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  5. trop trop bien !!!

    continue...
    on s'integre de suite dans l'univers, les personnages ....

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